Vivre le carême avec l'hospitalité Notre-Dame de Lourdes de Dijon

proposé par le père Vincent RICHARD, aumônier de l'hospitalité de Dijon

Dimanche 26 mars 2023, 5ème dimanche de Carême:


« Lazare, viens dehors! -et le mort sortit ». Une simple phrase et un homme au tombeau depuis quatre jours (et Marthe, esprit pratique, a fait remarquer, horrifiée, à Jésus: »mais, Seigneur, il sent déjà ») est là vivant devant la foule des gens qui venaient (comme cela nous arrive hélas souvent) participer à une cérémonie d’obsèques. Une simple parole…  Les quatre cent  cinquante prophètes de Baal sur le Mont Carmel multiplient les incantations, danses sacrées, en arrivent à se griffer jusqu’au sang pour que le feu divin tombe sur leur autel; le Prophète Elie installe tranquillement l’autel du Seigneur et, à l’heure du sacrifice du soir, le feu divin consume l’offrande prévue par la Loi. Le prestigieux général syrien Naaman, bras droit du roi de Damas, est furieux que le prophète Elisée ne multiplie pas les incantations pour le guérir de sa lèpre et se contente de lui dire d’aller se baigner dans le modeste cours d’eau du Jourdain (« nos fleuves de Damas sont plus importants »); ce sont des gens modestes, ses serviteurs, qui lui font remarquer: « si le prophète t’avait demandé quelque chose de difficile, tu l’aurais fait; alors pourquoi ne veux-tu pas faire quelque chose de tout simple? » Dieu est l’infiniment simple -et le Carême est là pour que nous nous y simplifiions et que nous retrouvions l’image de Dieu inscrite en nous lors de la Création.

Or l’un des points sur lesquels nous avons tous à progresser est notre PAROLE. La parole de Dieu est agissante, créatrice, vraie (« J’ai toujours parlé ouvertement, dit Jésus à Pilate »); nous ne nous émerveillerons jamais trop quand nous méditerons l’extraordinaire texte du prophète Ezéchiel sur les ossements desséchés: « ossements desséchés, écoutez la Parole de Dieu » et voici que les os se recouvrent de muscles puis de chair et voici qu’ils redeviennent des vivants!  Notre parole ne peut pas créer la vie ni modifier les réalités physiques; certes, l’homme a réussi à créer des techniques de reconnaissance vocale qui, par exemple, déclenchent l’ouverture d’une porte mais ce n’est pas la parole elle-même qui fait cela mais un moyen technique. Ce moyen fait honneur à ce que l’intelligence humaine peut réaliser quand elle est fidèle à sa mission de « soumettre la terre »; mais nous devons reconnaître que ni notre parole ni aucune technique vocale ne pourront jamais donner la vie.

Pourtant notre parole peut être  d’une certaine façon créatrice: celui qui ne comprenait pas reçoit une parole et tout devient clair; celui qui était perdu dans l’obscurité et s’affolait entend un appel et il reprend courage et retrouve la bonne direction ; celui qui était dans la peine reçoit une parole de consolation au sens vrai du mot (« heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés »); l’adolescent en pleine crise entend la parole rude mais vraie qui le fait grandir; celui à qui on apprend à prier trouve un trésor précieux pour toute sa vie. Et la Parole de Dieu proclamée change le coeur. Nous sommes alors à l’image de Dieu: nous créons ou recréons le bien et le vrai dans les intelligences, les volontés et l’âme.

1- La religion chrétienne n’est pas une « religion du Livre », elle est la religion de la Parole. Dieu nous a parlé en Se révélant à nous par le Verbe fait chair. Tout l’agir chrétien part de cette Parole. Est-ce que, lorsque je réfléchis à ce que je dois dire, ne pas dire, faire, ne pas faire, je me pose d’abord la question: que me dit Jésus pour ce cas? qu’aurait-Il fait? et puisque Jésus et l’Eglise, comme dit Sainte Jeanne d’Arc, « c’est tout un », que me dit l’Eglise? Si ma parole et mon action ont une autre base, elles partiront dans une direction mauvaise.

2- La religion chrétienne est la religion de la parole agissante: la lecture de l’Evangile agit en moi (d’où la triple croix  quand il est proclamé), les paroles des Sacrements ont une efficacité réelle, que ce soient les paroles du baptême, les paroles de la Consécration sur le pain et le vin, le « oui » du mariage… Est-ce que j’y crois?  Ou bien sont-ce pour moi de simples symboles? dans ce cas, ma foi est en grave danger.

3- La religion chrétienne est la religion de la parole donnée, du serment. Dans le monde antique où les rapports avec la divinité étaient fondés sur des sacrifices destinés à « apaiser les dieux » sans que le coeur de l’homme soit engagé par ces rites extérieurs, ce fut un immense changement. Si je ne tiens pas mes engagements, les prends trop vite sans savoir si je pourrai les tenir, je ne suis plus sur le bon chemin.

4- Ma parole doit être créatrice. Or, il y a aussi des paroles destructrices: celles qui se moquent méchamment, enferment l’autre dans son ignorance, humilient, salissent,la grossièreté, le juron. Quand la maison est très sale, le coup de balai doit être vigoureux. Faisons de ce Carême un temps de lutte résolu contre toutes nos paroles destructrices!

Mercredi 22 mars 2023:

Au chapitre 4 du Livre du Deutéronome Moïse exhorte le peuple à observer tous les commandements et décrets que Dieu lui a fait connaître:« vous les garderez, vous les mettrez en pratique; ils seront votre sagesse et votre intelligence aux yeux de tous les peuples. Quand ceux-ci entendront parler de tous ces commandements, ils s’écrieront: »il n’y a pas un peuple sage et intelligent comme cette grande nation ».

« Commandements et décrets » ne sont pas à prendre dans un sens trop purement juridique. En effet, ils ne sont pas donnés par les hommes mais par Dieu. Les décrets et lois donnés par les hommes ne peuvent se donner comme but (sinon, c’est de l’orgueil) que d’empêcher le mal de trop proliférer et de favoriser ce que l’on reconnait comme bon. Quand il s’agit de Dieu, Il connait toute chose et, à la fin du récit de la Création ,le Livre de la Genèse nous dit:« Dieu vit tout ce qu’Il avait fait, c’était très bon ». S’Il le révèle à un peuple )le peuple d’Israêl pour la première Alliance, le peuple chrétien pour la nouvelle Alliance), cela n’est en aucune façon pour l’enserrer dans des règlements mais pour que l’oeuvre de création confiée à l’homme s’épanouisse pleinement; les observer et les mettre en pratique, c’est être INTELLIGENT et SAGE

1- Les autres peuples vont voir cette intelligence et cette sagesse et ils auront envie de la mettre eux aussi en pratique. C’est l’EVANGELISATION dont la meilleure définition est de viser le développement intégral de tout l’homme et de tout homme. C’est en regardant le chrétien que les autres peuples vont avoir la première idée de l’intelligence et de la sagesse divine -et cette idée rejoindra la voix de leur conscience et de la morale naturelle et les illuminera. Donc, le monde a besoin de chrétiens et de chrétiens qui « rendent compte de l’espérance qui les habite ». En suis-je conscient?

2- Attention à ne pas se tromper! Ce n’est pas la personne du chrétien qui est intelligente et sage, ce sont « les commandements et décrets » qu’il essaie de mettre en pratique qui font qu’intelligence et sagesse sont visibles en ses paroles et ses actes. La Fontaine a une fable très amusante sur l’âne qui porte des reliques: l’âne croit que c’est vers lui que courent les foules et que c’est devant lui que tous se prosternent. Sainte Bernadette, reléguée dans le cloître de Nevers, a plus de bon sens: « le Bon Dieu avait besoin d’un balai et Il m’a prise pour cela; maintenant, Il m’a reposée dans un coin et c’est bien ainsi ».

3- L’intelligence et la sagesse ne seront visibles que si je suis fidèle aux « commandements et décrets ». Si celui qui est vu comme chrétien choisit dans la foi révélée ce qui lui « convient » (je crois à ceci, pas à cela: je ne crois pas aux miracles rapportés dans les Quatre Evangiles, je ne crois pas à la virginité de Marie, j’adhère à telle thèse clairement condamnée par l’Eglise…), manque la Messe dominicale sans raison, ne respecte pas la morale conjugale et familiale, fraude, triche, ment… non seulement il n’est plus en rien intelligent et sage mais il crée un scandale: les « autres peuples » croient voir un chrétien et ils ne voient que quelqu’un qui fait obstacle entre eux et le Vrai Dieu.

4- Nous ne méditerons jamais assez la réponse de Marie à l’Annonciation: « Je suis la servante du Seigneur que tout se fasse en moi selon ta parole ». Et à Cana: »tout ce qu’Il vous dira, faites-le ».

 

Dimanche 19 mars 2023, 4ème dimanche de Carême:

On appelle aussi ce dimanche « dimanche de Laetare », mot latin qui signifie « réjouis-toi » et qui est le premier mot du chant d’entrée de la Messe; au lieu du violet, le prêtre peut avoir un ornement plus lumineux, rose; les textes de la Messe parlent de la joie; Saint Paul dit aux chrétiens d’Ephèse: « autrefois, vous n’étiez que ténèbres; maintenant, dans le Seigneur, vous êtes devenus lumière »; et l’Evangile de Saint Jean nous fait partager la joie immense de l’aveugle-né qui découvre le monde, ses reliefs, ses couleurs, les visages humains.

Il est bon de nous conseiller les uns aux autres les lectures qui nous ont aidé dans notre foi. Personnellement, j’avais beaucoup aimé un texte du Pape Paul VI, l’Exhortation Apostolique « la joie chrétienne » publiée le 9 mai 1975. C’est un texte court (l’édition de poche en gros caractères fait 76 pages) et facile à lire. Paul VI réfléchit successivement sur le besoin de joie au coeur de tous les hommes, puis sur l’annonce de la joie chrétienne dans l’Ancien Testament, sur la joie selon le Nouveau Testament, la joie au coeur des saints, une joie pour tout le peuple, la joie et l’espérance au coeur des jeunes et enfin la joie du pèlerin (pour 1975 qui était une année sainte).

Le coeur du texte  est « de bien saisir le secret de la joie insondable qui habite Jésus et qui Lui est propre… Si Jésus rayonne une telle paix, une telle assurance, une telle allégresse, une telle disponibilité, c’est à cause de l’amour ineffable dont Il Se sait aimé de Son Père. Lors deSon baptême sur les bords du Jourdain, cet amour, présent dès le premier instant de Son Incarnation, est manifesté: »Tu es Mon Fils bien-aimé, Tu as toute Ma faveur ». Cette certitude est inséparable de la conscience de Jésus. C’est une présence qui ne Le laisse jamais seul. C’est une connaissance intime qui Le comble… »

1- Il y a des joies fugitives: pour ne parler que des bonnes joies (car il y en a hélas des mauvaises: une vengeance, les paradis artificiels et autres addictions; après coup, elles laissent en nous un goût amer) une anecdote amusante, un bon moment passé avec des amis, un beau paysage, une oeuvre d’art… ; elles nous font du bien et nous aident à affronter les moments plus difficiles mais elles restent fugitives. Ne peut être durable que la joie de savoir où l’on va, le but du chemin, le sens de notre vie.

2- « Tu es Mon fils bien-aimé »: ce n’est pas seulement à Jésus que cette phrase s’adresse; avons-nous conscience que c’est la situation de tout baptisé? Et ce n’est pas un simple sentiment, c’est un fait réel: le baptême est un signe visible, efficace et permanent (on peut tout nous prendre, tout nous voler: personne ne pourra nous voler notre baptême) de la présence de Dieu en nous et de Son amour indéfectible. Cet amour n’a pas de « fils ou fille préféré », Dieu aime chacun de Ses innombrables enfants, c’est la seule vraie égalité entre les hommes. Nous sommes attendus par Dieu dans la grande maison du Ciel, même si c’est après bien des détours que, comme le fils prodigue, nous revenons vers Lui. Et, aux moments où nous aurions tendance à ne pas comprendre cet amour trop grand, Il nous dit comme au fils aîné: »toi, mon enfant, tu es toujours avec Moi ».

3- Nous sommes trop matérialistes et oublions que Dieu nous attend. La foi ne doit pas être seulement de demander de l’aide à Dieu pour nos soucis  d’ici-bas (même si cette prière, si elle n’est pas égoïste, n’a rien de mauvais), elle doit toujours être « tendue vers les réalités d’en-haut ». Et n’oublions pas ce qui fut révélé à Bernadette: »je ne vous promet pas le bonheur dans ce monde mais dans l’autre ».

4- Le Carême est long. N’oublions pas le but; et que les épreuves du chemin ne nous enlèvent pas la joie de savoir qu’un immense amour nous attend.

« Je vais à la vie, à la lumière, à l’amour » (derniers mots murmurés par Ste Elisabeth de la Trinité)

Mercredi 15 mars 2013:

Au chapitre 17 du Livre de l’Exode, le peuple d’Israël campe dans le désert à Rephidim; le peuple a soif et récrimine contre Moïse:« pourquoi nous as-tu fait monter d’Egypte? était-ce pour nous faire mourir de soif avec nos fils et nos troupeaux? ». Et voici le chapitre 14; à la vue des chars de Pharaon « manquait-il de tombeaux en Egypte que tu nous aies mené mourir dans la désert?… ». La mer a englouti les chars mais voici le chapitre 16:« que ne sommes-nous morts de la main de Yavhé au pays d’ Egypte quand nous étions assis auprès de la marmite de viande et mangions du pain à satiété! » Quarante ans ont passé et voici le chapitre 14 du Livre des Nombres alors que reviennent les envoyés qui ont découvert la Terre Promise:« que ne sommes-nous morts au moins dans ce désert! pourquoi Yavhé nous mène-t-Il dans ce pays pour nous faire tomber sous l’épée, pour livrer en butin nos femmes et nos enfants? ». Ce ne sont là que quelques textes: pendant quarante ans, n’ont pas cessé les murmures: les oignons d’Egypte, le veau d’or, la manne toujours pareille…

Murmure: un mouvement assez indistinct de la bouche, à voix assez haute pour qu’on l’entende, assez basse pour qu’on ne comprenne pas les paroles. L’enfant boude parce qu’on ne lui passe pas son caprice, l’adolescent murmure contre cette société pourrie qui ne comprend pas les jeunes, le mauvais joueur récrimine, on grogne contre le gouvernement, les patrons, cette Eglise qui n’évolue pas… Qu’est-ce que le murmure apporte? Rien -sinon une mauvaise ambiance, le découragement de ceux qui essaient d’agir et finalement rien de constructif ne se fait.  Le murmure n’a rien à voir avec la critique constructive faite en dialogue respectueux avec celui qui propose une idée, un chemin, un projet. Moïse et Aaron se découragent: « ce peuple a la tête dure ».

Ont-ils oublié? En Egypte, le peuple était esclave, il subissait le fouet des chefs de corvées, les premiers-nés étaient tués à la naissance. Le Seigneur a fait sortir le peuple à main forte et à bras vigoureux, la Mer Rouge a englouti les chars de Pharaon, Dieu a donné la Loi, Il les a nourri et abreuvé, libéré de la morsure de serpents brûlants…

1- Il n’y a pas besoin d’apprendre à un enfant à demander; lui apprendre à dire « merci » est long et toujours à reprendre. Ce n’est pas propre à l’enfant: savons-nous voir ce que nous avons reçu et dire merci? Est-ce que ce n’est pas trop souvent la réclamation (qui peut certes être justifiée) qui vient en premier? Nous pouvons le regarder et dans notre rapport au prochain et dans notre prière.

2- La mémoire garde (et c’est une bonne chose) plutôt le souvenir des moments heureux  et nous risquons de les idéaliser: le regret des oignons d’Egypte fait oublier le fouet du chef de corvée. Et si l’on va au fond des choses, la liberté nous fait peur; cela vaut pour la foi chrétienne et Saint Paul le rappelle souvent: si le Christ vous a libéré des prescriptions purement rituelles, ce n’est pas pour que vous retombiez dans l’esclavage. Aide-nous, Seigneur, à nous mettre en route avec courage et, si le chemin est dur, « chante si tu es fatigué »..

3- Le grognon gâche tout autour de lui, il fait de la peine à ceux qui se donnent du mal, il les décourage; est-ce là aimer son prochain? Et si nous essayions de lutter plus particulièrement durant ce Carême contre nos murmures?

4- Un petit moyen pour progresser: je vois les défauts de telle personne -je m’efforce de lui trouver au moins une qualité.

« Dieu vit tout ce qu’Il avait fait: c’était très bon ».

Dimanche 12 mars 2023, 3ème dimanche de Carême:

Au puits de Jacob, la Samaritaine est très étonnée (et les Apôtres à leur retour de la ville le seront aussi): comment, Lui, un homme et un juif, Il lui  parle à elle, une femme et une Samaritaine! Ce n’est pas la coutume et les deux peuples ne s’entendent pas du tout. C’est bien Jésus qui a voulu et engagé ce long dialogue qu’elle n’aurait jamais imaginé.

Par contre, l’Evangile de Saint Luc, dans le récit de la Passion (étonnant comme chacun des quatre évangélistes, tout en ayant un récit des faits qui concorde parfaitement avec les autres, nous donne des petites notations pleines d’intérêt!), nous parle de quelqu’un qui voulait rencontrer Jésus depuis longtemps : Hérode Antipas, fils d’Hérode le Grand, tétrarque de Galilée et de Pérée. Pilate, embarrassé par cette affaire, avait  espéré se tirer de la difficulté en renvoyant Jésus à la juridiction d’Hérode puisque que Jésus était galiléen. « Hérode, en voyant Jésus, fut tout joyeux car, depuis assez longtemps, il désirait Le voir pour ce qu’il entendait dire de Lui; et il espérait Lui voir faire quelque miracle. Il L’interrogea donc avec force paroles mais Jésus ne lui répondit rien. »

Qui est Hérode? un roi avec couronne, palais, grandes fêtes, courtisans, mais sans pouvoir réel; les Romains, dans leur immense Empire utilisaient habilement le principe « diviser pour régner » et installaient  donc dans les pays conquis ce genre de « rois ». Fils d’un massacreur (les nouveaux-nés de Bethléem), Antipas a pris la femme de son frère Philippe et, ayant bu plus que de raison, il promet à la danseuse Salomé « ce que tu veux, même la moitié de mon royaume ». Il a fait mettre en prison Jean-Baptiste pour le fait d’avoir simplement dit la vérité « tu n’as pas le droit de prendre la femme de ton frère » mais « il aime l’entendre » et il est contrarié que Hérodiade, suite à son imprudente promesse, fasse demander à Salomé la tête de Jean Baptiste -contrarié certes mais il cède. Que Jésus peut-il dire à cet homme?

La Samaritaine a une vie compliquée (elle a eu cinq maris et celui avec qui elle est n’est pas son mari), sa religion est déviante (« le salut vient des Juifs »); il faut vraiment être dans la difficulté pour être obligée d’aller au puits hors de la ville  en pleine chaleur. On ne peut que comprendre son suppliant « Seigneur, donne-moi de cette eau! »

1- Hérode représente le repu, le vautré (des siècles auparavant le prophète Amos dénonçait déjà la bande des vautrés de la ville de Samarie), celui qui s’intéresse vaguement à tel sujet, qui « aime bien » écouter le prophète mais dont la vie, faite de corruption, de soif de pouvoir et de luxure, de fêtes, de promesses inconsidérées, le rend incapable d’entrer en dialogue avec Jésus.  Pire encore: alors que Pilate, trop politique, ne va pas au fond de son « qu’est-ce que la vérité » mais reste étonné par le mystère de Jésus, Hérode, vexé « Le traite avec mépris et Le bafoue ». Si nous n’affrontons pas les exigences du Carême, son désert, ses renoncements, si nous restons dans un vague « intérêt pour les choses spirituelles », nous ne rencontrerons pas Jésus.

2- La Samaritaine, écrasée par ses corvées d’eau en plein soleil, par sa vie dure et compliquée, désire. Sommes-nous dans l’esprit de ces extraordinaires Psaumes: « Dieu, Tu es mon Dieu, je Te cherche dès l’aube, mon âme a soif de Toi » ou « mon coeur et ma chair sont un cri vers Toi, le Dieu vivant »? Est-ce que nous nous disons: j’ai BESOIN de la prière,  BESOIN du Jour du Seigneur, de la Sainte Communion, de la Confession…?  Pensons-nous que nos malades, nos anciens, ceux que nous visitons sont comme la Samaritaine? Eux aussi désirent – et c’est nous que le Seigneur charge de leur donner de cette eau.

3- Ecouter le Seigneur, quand on a vraiment SOIF de Lui, nous amène toujours à nous remettre devant ce que nous sommes (« cet homme m’a dit tout ce que j’ai fait ») et nous fait découvrir le vrai sens de notre vie. Puisse notre prière, notre lecture de la Parole de Dieu, notre accueil des Sacrements ne jamais devenir une routine: ce qui a commencé très simplement (un homme qui me parle au bord d’un puits, un signe de croix qui ouvre ma prière…) est un moment essentiel, fondateur.

4- « Et il y eut dans cette ville une grande joie » alors que Hérode est retourné à ses beuveries, à ses intrigues; il ne verra jamais de miracle..

Psaume 42: « Comme un cerf altéré cherche l’eau vive, ainsi mon âme Te cherche, Toi mon Dieu; mon âme a soif du Dieu vivant, quand Le verrai-je face à face? »

Mercredi 8 mars 2023:

Quand nous disons que, en Carême, nous sommes invités comme les Apôtres, à monter à Jérusalem avec Jésus, nous oublions qu’il n’y avait pas que les Apôtres. Mais ce n’est pas complètement de notre faute: il faut attendre la scène de la Passion pour apprendre que, au pied de la croix, il y avait « de nombreuses femmes (et chacun des quatre Evangiles nous donne quelques noms), celles-là même qui avaient suivi Jésus depuis la Galilée et Le servaient ». Aucun des quatre évangélistes n’a jamais parlé d’elles avant, alors que ce service a dû durer depuis la constitution du groupe des Apôtres, soit trois ans!

Ces Apôtres dont nous connaissons tous les noms et, pour plusieurs d’entre eux, une personnalité bien dessinée, ont des moments très beaux (« montre-nous le Père », « à qui irions-nous? ») mais ils sont loin d’être exemplaires: ne comprennent pas ce que Jésus dit, veulent Le dissuader de monter à Jérusalem, se disputent pour savoir qui est le plus grand, s’endorment quand Jésus leur demande de veiller avec Lui à Gethsémani… La présomption de Pierre (« si tous T’abandonnent… »), ses deux épées qu’il agite ridiculement, ses trois reniements alors qu’il ne risquait rien. Judas qui n’arrive pas à aimer Jésus plus que son cher argent et qui ne croit pas à la capacité de pardon de Jésus, se condamnant au néant. Le fait est que tous se sont enfui; il semble seulement qu’il y en ait un, un seul au pied de la croix.

Les femes, elles, sont toutes là, elles s’occupent de recueillir le corps, de lui trouver une digne sépulture, de respecter tous les rites funéraires et, le premier jour de la semaine, alors que les disciples se dispersent, elles  tiennent à aller dès le lever du jour compléter les rites funéraires que le sabbat commençant  n’a pas permis d’accomplir. Service fidèle, sans paroles mais en actes, et qui a dû être de la même merveilleuse qualité durant trois ans.

1- D’un côté, beaucoup de paroles et la fuite honteuse. De l’autre, le service silencieux et fidèle. Invitation à ne pas nous mettre en avant, à ne pas promettre ce que nous ne sommes pas sûrs de pouvoir tenir. Et pour notre Carême, invitation à des efforts discrets, modestes, mais quotidiens.

2- Le service de l’hospitalier doit être à l’image des Saintes Femmes: servir les malades et être disponible, sans bruit mais efficacement et fidèlement. Seigneur, donne-nous la grâce d’un service fidèle.

3- Tous ceux qu’on ne remarque pas, les « petites mains »: que ferions-nous sans elles? Et, avouons que, comme les évangélistes, nous les oublions complètement. Qui faisait l’intendance du groupe des Apôtres? il faut attendre la fin de l’Evangile pour le savoir. Seigneur, donne-nous de savoir regarder autour de nous.

4- Et, dans une société de violence et de dérision, demandons le respect de la femme, de celui ou celle qui assure les « petits métiers » du quotidien

   Psaume 130:  Seigneur, je n’ai pas le coeur fier ni le regard ambitieux. Je ne poursuis ni grand dessein ni merveille qui me dépasse.

                            Non mais je tiens mon âme égale et silencieuse; mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère.

                            Attends le Seigneur, Israël, maintenant et à jamais.

 

Dimanche 5 mars 2023, 2ème dimanche de Carême:

 

Tous ceux qui ont eu le bonheur de faire de l’alpinisme ou une randonnée de plusieurs jours en montagne savent qu’il faut partir très tôt pour arriver au sommet ou traverser le col avant l’après-midi. On quitte le refuge dans la nuit, mal réveillé, le sac est pesant, on bute sur les pierres et le souffle est court. Or, il y a un moment très bref et très précieux: à l’aurore, dans une belle lumière douce, on voit le sommet ou le col; cela ne dure qu’un instant, les brumes matinales recouvrent tout très vite et l’on reprend la marche avec le même effort physique -mais tout a changé: on a vu le but, c’était magnifique et l’on sait que cela vaut la peine d’aller jusqu’au bout.

L’Eglise, dans sa liturgie, s’adapte avec beaucoup de psychologie aux rythmes humains. Nous avons commencé notre Carême il y a déjà douze jours et nous pouvons être tentés par le découragement. Le Carême n’est jamais facile; les tentations se font insistantes, les efforts que nous avons entrepris nous paraissent trop durs, il y a eu des échecs, des relâchements et, dans un monde qui n’est pas du tout porteur pour le chrétien, vient la pensée: »à quoi bon? ». C’est à ce moment que l’Eglise nous présente la scène de la Transfiguration; Pierre, Jacques et Jean ont dû peiner pour monter sur cette haute montagne et se demander pourquoi Jésus voulait leur imposer cet effort: et voici une scène magnifique. Essayons de nous la représenter: la beauté de Jésus, la paix, la confirmation que Jésus vient bien accomplir la Loi et les Prophètes avec la présence de Moïse et Elie; oui « il est heureux que nous soyons ici ». La scène ne dure qu’un temps, il faut redescendre mais ils en resteront marqués: « nous étions avec Lui sur la montagne sainte » (Saint Pierre), « nous avons vu Sa gloire (Saint Jean). Oui, nous savons où nous mène le chemin, cela vaut la peine d’aller jusqu’au bout.

1- « Je veux voir Dieu »: Dieu, c’est l’infinie bonté, l’infinie justice, l’infinie pureté, l’infinie beauté. Un jour, je Le verrai, je serai avec Lui, Il me recevra à Sa table et je serai dans Son amour pour toujours. Pour quoi faire de Dieu une « question », un « inconnaissable »? Il est le véritable ami Il nous aime; dans notre Carême et dans toute notre vie, que la joie soit toujours là y compris dans l’épreuve; ayons le désir de Dieu:« Dieu, Tu es mon Dieu, je Te cherche dès l’aube, mon âme a soif de Toi ».

 

2- Dieu nous donne des signes, des lumières sur la route: elles existent; elles peuvent être très simples: une prière sereine, la joie qui suit l’absolution et la Sainte Communion, un temps fort (pèlerinage, groupe de prière…); il y a aussi les belles rencontres (avec telle personne dont la foi rayonne, un beau paysage, une oeuvre d’art qui nous portent à la louange). Il y a aussi tel moment précis où j’ai senti la présence de Dieu, où Il a vraiment agi dans ma vie: ce n’est pas si rare, sachons le discerner. De même que l’on fait des provisions pour la route, gardons précieusement ces signes, ces lumières pour les moments (qui peuvent être longs..) où la route sera plus dure:« souviens-toi des merveilles de Dieu ».

3- Seuls trois des Apôtres ont été choisis par Jésus pour être témoins de ce moment précieux; cela veut dire que, le moment venu, ils devront rayonner cette joie, la partager. Dans nos visites aux malades, à ceux qui souffrent, sommes-nous témoins de la joie de Dieu? et le sommes-nous à bon escient?

4- Pour les malades, ceux qui n’ont plus d’autonomie, une visite, une prière partagée, la Sainte Communion portée à eux sont des moments très précieux. Au retour de Lourdes, ils ne se plaignent pas de la fatigue, ils sont heureux. C’est notre devoir de chrétiens et d’hospitaliers de faire que le plus possible puisse recevoir cette joie.

Par les cieux devant Toi, splendeur et majesté, par l’infiniment grand, l’infiniment petit, et par le firmament, ton manteau étoilé, et par frère soleil, je veux crier:

MON DIEU, TU ES GRAND, TU ES BEAU, DIEU VIVANT, DIEU TRES HAUT, TU ES LE DIEU D’AMOUR. MON DIEU, TU ES GRAND, TU ES BEAU, DIEU VIVANT, DIEU TRES HAUT, DIEU PRESENT EN TOUTE CREATION.

 

Mercredi 1er mars:

 

Jusqu’à ce que l’Empereur Constantin autorise le culte chrétien en l’an 313, les chrétiens ont dû vivre dans un monde païen qui les détestait et les persécutait; il n’était pas permis d’être chrétien, pas de lieux de culte autorisés, vie dans la clandestinité, aucune possibilité de faire reconnaître par les autres les comportements que ne nous permet pas la foi chrétienne. Il n’a été possible d’envisager la constitution de l’année chrétienne (avec ses fêtes, ses temps d’Avent, de Noël, de Carême, de Pâques) qu’après 313. Mais les chrétiens ont dès l’origine marqué la semaine par trois jours spécifiques: le dimanche qui n’était bien sûr pas chômé (« le premier jour de la semaine ») qu’ils ont toujours célébré, très tôt, avant d’aller au travail, malgré les interdictions; un jour de jeûne le vendredi, jour de la Passion du Christ; mais aussi un autre jour de jeûne, auquel nous ne pensons plus, le mercredi car c’est le jour où Judas va livrer Jésus.

Nous n’aimons pas trop parler de Judas, comme s’il nous gênait. Ou encore nous en faisons un monstre. Or il faut le regarder en face: Judas n’est pas différent de nous; c’est un homme comme les autres avec ses qualités et ses défauts; c’est un disciple; c’est un des douze Apôtres; et c’est un prêtre -car il n’a quitté le repas du Jeudi-Saint qu’après avoir pris une bouchée au plat avec Jésus et après avoir reçu les paroles:« vous ferez cela en mémoire de Moi ».

 

Judas a été appelé par Jésus et il L’a suivi librement; il a vécu avec Lui pendant TROIS ANNEES COMPLETES, il a partagé Ses voyages, Ses repas, il a vécu Ses joies et Ses peines, il L’a entendu prêcher, il a vu Ses miracles. S’il y a parfois des querelles entre les Apôtres (Jacques et Jean qui veulent des « bonnes places »…), Judas n’y semble pas mêlé; on doit lui accorder de la confiance car c’est lui qui gère la bourse commune. Donc, il aime certainement Jésus mais il aime aussi l’argent. « Vous ne pouvez pas servir deux maîtres ».

Les chrétiens des premiers siècles avaient raison de regarder Judas en face. Méditons nous aussi ce qu’il nous apprend-douloureusement:

1- Nous servons souvent deux maîtres: nous sommes chrétiens bien sûr et nous aimons Jésus mais nous aimons aussi d’autres maîtres. En voici quelques-uns (mais il y en a bien d’autres): notre réussite, notre désir de plaire, de nous faire remarquer, le travail avant tout (prière, famille… si j’ai le temps), notre confort… Et singulièrement L’ARGENT: on pourrait dire « c’est un maître parmi d’autres » mais Jésus « qui connaît le coeur de l’homme » cite explicitement ce maître-là: de fait, les statistiques le montrent, l’immense majorité des crimes et délits a l’argent pour motif. Prenons le temps de réfléchir loyalement: quels sont les maîtres qui entrent en concurrence dans mon coeur avec Jésus? et quel est mon rapport à l’argent?

2- Et si notre effort de Carême se concentrait sur la lutte prioritaire contre le (ou les -mais sans trop disperser nos efforts) maître(s) que j’ai identifié(s)?

3- Méditer sur le désespoir de Judas et son suicide, c’est nous poser la question: est-ce que je crois à la capacité de pardon de Dieu? Spéculer sur le fait que la trahison de Judas serait plus grave que la présomption de Pierre avec ses deux épées, que son triple reniement, que la fuite des autres quand Jésus est arrêté, n’a pas d’intérêt. Si Judas avait demandé pardon, certes il faut se garder de raisonner sur ce que l’Evangile ne dit pas mais comment douter que le Christ lui aurait accordé son pardon? Le seul péché qui ne sera pas pardonné, c’est le péché contre l’Esprit-Saint; douter comme Judas de l’infinie miséricorde de Dieu ne serait-ce pas le péché contre l’Esprit-Saint?

4- Il y a des pardons que j’ai du mal à accorder, voire même à envisager d’accorder. Et je remets à un « plus tard » indéfini la confession que l’Eglise me demande pourtant clairement (c’est un commandement de l’Eglise) de faire pour Pâques. Que je ne suive pas la voie sans issue de Judas.

« Heureux l’homme dont la faute est pardonnée et le péché remis ».

 

 

Dimanche 26 février, 1er dimanche de Carême:

 

Le 29 mai 2005, lors de son sermon au 24ème Congrès Eucharistique d’Italie, Benoit XVI a médité une réponse d’un des martyrs d’Abitène (province romaine d’Afrique Proconsulaire, actuelle Tunisie) au juge du tribunal de Carthage qui constatait sa désobéissance à l’édit de l’Empereur Dioclétien, édit qui interdisait toute possession de livre chrétien et toute réunion de chrétiens sous peine de mort. Ce chrétien, du nom de Saturnin répondit: « sans le jour du Seigneur, nous ne pouvons pas ». Ces quarante-neuf chrétiens d’Abitène arrêtés un dimanche, le 12 février 304 (parmi eux, il y avait des enfants dont l’un qui déclara: « j’étais là de ma propre volonté »), furent longuement torturés pour les faire apostasier; ils demeurèrent fermes et furent mis à mort.

« Nous ne pouvons pas ne pas célébrer le jour du Seigneur »: le sens est double. Quel sens aurait la foi chrétienne si elle ne célébrait pas la Résurrection, fondement de notre Foi, de notre Espérance et de notre Charité? -et comme la Résurrection est un événement réel, historique, et qu’elle a eu lieu le premier jour de la semaine (qui n’est pas chômé chez les Romains), peu importe, c’est ce jour-là qu’on la célébrera: on se rassemblera très tôt  le matin. Mais c’est aussi: nous ne pouvons pas vivre les exigences d’amour de Dieu et du prochain qu’implique notre Foi si nous ne puisons pas les forces indispensables dans le rassemblement autour du Seigneur vivant et présent.

Nous pouvons méditer quatre points:

1-Suis-je heureux de fêter le Jour du Seigneur? Nos anciens « s’endimanchaient »: le garagiste plein de cambouis, le paysan tout boueux, la mère de famille épuisée par les lessives à la main, les repas à préparer…, tous étaient conscients que, petites gens écrasés de durs labeurs, ce jour-là leur rendait leur dignité d’enfants bien-aimés du Père (Saint Léon le Grand: « chrétien, reconnais ta dignité »). Le dimanche n’est pas D’ABORD une obligation, il est notre respiration, notre participation au repos de Dieu le Créateur.

2- Notre Carême est un temps d’effort; il n’est pas facile de progresser dans la prière, le partage, la privation acceptée, le pardon; il est long, avec des risques de découragement, de rechute; il est un temps où les tentations se font plus fortes (rien d’étonnant à cela: nous suivons Jésus au désert et il y affronte le Tentateur). Le dimanche est l’étape sur le chemin; nous y reprenons des forces dans la Parole de Dieu et l’Eucharistie .

3- Tant de gens sont privés du dimanche chrétien: enfants à qui personne n’a fait connaître Jésus, tous ceux qu’une société de consommation effrénée FORCE à travailler le dimanche (dans bien des entreprises, des pressions sont exercées en ce sens), villages isolés où le prêtre ne vient jamais, pays (nombreux hélas) où sévit la persécution… Notre participation active à la célébration dominicale doit se faire dans la communion des Saints: je prie pour ceux qui ne peuvent pas venir.

4- Parmi ceux qui sont privés du dimanche, il y a nos malades et nos anciens; ils voudraient tant être à la Messe du dimanche mais ils n’ont plus la force de nous y rejoindre. C’est à nous d’aller les rejoindre. Allons-nous les visiter, prier avec eux, leur porter la Sainte Communion? essayons-nous de repérer ceux qui ne viennent  plus?

« Voici le jour que fit le Seigneur, jour d’allégresse et jour de joie ».

Méditation du mercredi des cendres :
 

« Voici que nous montons à Jérusalem et que s’accomplira tout ce qui a été écrit par les Prophètes concernant le Fils de l’homme. Il sera en effet livré aux païens, bafoué, outragé, couvert de crachats ; après L’avoir flagellé, ils Le tueront et, le troisième jour, Il ressuscitera » (Saint Luc, 18,31). NOUS montons : dans les Evangiles (et tous concordent), les annonces de la Passion disent bien que, chrétiens entrant en Carême, nous marchons avec le Christ comme Apôtres et disciples ont marché avec Lui il y a deux mille ans et cette marche est une montée et a un but : affronter les épreuves de la montée et de la Passion pour avoir part à Sa résurrection et à la vie éternelle.

Pour commencer ce Carême 2023, nous pouvons nous fixer quatre points d’attention :

1- Seul Jésus sait où Il va et où Il nous propose d’aller : à chaque annonce de la Passion, les Evangiles nous disent que les Apôtres ne comprennent pas, s’exclament « Dieu T’en garde ! cela n’arrivera pas »; mais cependant ils L’écoutent et Le suivent. Le Carême est d’abord un temps de dialogue avec Jésus et de confiance renouvelée en Lui. Que notre Carême soit d’abord un temps de prière -et de prière qui soit d’abord : « Seigneur, éclaire-moi sur le chemin que je dois prendre et donne-moi la force de le suivre

2- La montée à Jérusalem n’avait rien d’une promenade de santé ; la ville s’étage de 600 à 800m d’altitude et on y montait depuis le niveau de la mer voire depuis la Mer Morte à MOINS 434m ! Rude montée, avec des dangers, des brigands (voir la parabole du Bon Samaritain). Acceptons les efforts et privations de Carême, le long, très long effort (40 jours)  -et soyons vigilants aux tentations : dans les longues montées, on a souvent envie de s’arrêter ou même de se décourager jusqu’à rebrousser chemin.

3- Nous ne sommes pas seuls ; comme en montagne, c’est une cordée qui monte. Le groupe des Apôtres avait besoin de se soutenir, d’éviter les querelles (Jacques et Jean qui intriguent pour avoir les « bonnes places »…), de ne pas se décourager devant les défections (Judas qui trahit) et de respecter le rythme de chacun: au matin de Pâques le jeune Jean arrive au tombeau avant Pierre, plus vieux et essoufflé, mais, respectueux de son rang, il attend pour le laisser entrer le premier). Prions les uns pour les autres, pour les personnes qui nous sont confiées et n’ayons pas peur de partager entre nous des intentions de prière.

4- Les malades ne peuvent plus monter : leurs jambes les trahissent, leur cœur fragile leur interdit tout effort, ils n’ont plus de souffle et parfois même obligation d’un appareil respiratoire. Non seulement nous prierons particulièrement pour eux mais nous les PORTERONS au sens strict du mot, comme la petite Thérèse cloîtrée dans son Carmel de Lisieux et qui dit : »je marche pour un missionnaire épuisé ».

Il y a une série de Psaumes appelée « Psaumes des Montées » ; ce sont ceux du pèlerin qui monte à Jérusalem. Nous pouvons méditer le Psaume 120 :

Je lève les yeux vers les montagnes ; d’où le secours me viendra-t-il ?Le secours me viendra du Seigneur qui a fait le ciel et la terre.Qu’il empêche ton pied de glisser, qu’il ne dorme pas, ton gardien.Non, Il ne dort pas, ne sommeille pas, le Gardien d’Israël.Le Seigneur ton gardien, le Seigneur ton ombrage, se tient près de toi.Le soleil pendant le jour ne pourra te frapper, ni la lune pendant la nuit.Le Seigneur te gardera de tout mal, Il gardera ta vie.Le Seigneur te gardera au départ et au retour, maintenant, à jamais.Gloire au Père et au Fils et au Saint-Esprit, maintenant et à jamais et pour les siècles des siècles. Amen.